C'est une fashion week pleine d'histoires qui vient de se terminer. Des histoires comme les gens de la mode en raffolent. 

La première, évoquée plus haut, c'est le dernier défilé de Hedi Slimane pour Saint Laurent. Je résume les faits pour mes lectrices qui ne suivent pas l'actu de la mode (je sais qu'elles sont nombreuses). Hedi Slimane, le nouveau styliste de la maison Yves Saint Laurent, connu pour avoir marqué le vestiaire masculin au début des années 2000, un garçon très rock, très underground, a présenté une 2 ème collection femme pour le moins déconcertante. 

En clair, si on ne sait pas que c'est Saint Laurent, on croit dur comme fer que c'est une présentation de Mango ou Berschka. Étonnement gêné des professionnels, personne ne s'avance de peur de passer pour une plouc qui ne verrait pas là une révolution. 

Certains  analysent finement " Yves se fichait de la mode au profit du style, Hedi se fiche des codes au profit du concept. "   et "il est impensable que Hedi Slimane ait crée une collection sans une vraie réflexion"   D'autres ne montrent même pas les visuels du show mais les people qui y étaient. Bref tout le monde tourne autour du pot ou se tait en attendant d'avoir du recul. Car il y a une chose dont on est sûr: on ne critique pas les choix de Pierre Bergé.

Suzy_.jpgSuzy Menkès (illustration pour "Le Dictionnaire de la mode" de Sylvie Barbier éditions François Bourin)

La deuxième affaire est en fait antérieure au défilé de Saint Laurent Paris. C'est l'affaire du papier de Suzy Menkès. Beaucoup de blogs l'ont relatée et commentée avec beaucoup d'intelligence ici, ici  et . Je me permets d'apporter mon regard. Comme Suzy Menkès, j'ai connu l'époque des défilé parisiens où nous étions en noir comme des corbeaux. Où nous nous pressions aux défilés de Jean-Paul Gaultier religieusement et les yeux plein d'espoir. Nul ne regardait l'autre. S'habiller était un signe d'appartenance à une tribu pas de l'auto promotion. À l'époque, on allait voir les collections, pas les gens qui les portaient.

Oui, c'est le souk aujourd'hui devant les défilés. Je comprends l'agacement des journalistes qui doivent, pour atteindre leur siège,  braver la  foule comme une tempête au Cap Horn. Certains, nostalgiques, ont le sentiment d'être dépossédés de "leur" fashion week: "C'était mieux avant... (Soupir)"  Avant ?  Mais avant la mode était un petit milieu... d'élites. Dans lequel ne rentrait pas n'importe qui.  Combien de stagiaires sortis d'école maltraités, snobés ou méprisés par une corporation où ils faut être beau, hystérique ou cynique. Malheur au ringard, ou à la pépette qui aime encore l'acrylique malgré trois années d' Esmod.

Les blogs, c'est peut-être la meilleure chose qui soit arrivée à la mode. Non pas parce que maintenant il peut y avoir des ringards. Mais parce qu'aujourd'hui, plus de styles ont tribune grâce aux blogs. Combien de marques qui n'ont jamais eu de pages dans les magazines ont été contentes de trouver une blogueuse sympa pour parler d'eux?
J'avais été attristée à mon arrivée dans le milieu des blogueurs de voir combien de jeunes, la trentaine venue n'avaient toujours pas de carrière et logeaient chez leurs parents. Que seraient devenus tous ces gens si leurs blogs ne leur avaient pas apporté confiance en soi, réseau relationnel et tribune? 
Alors, c'est vrai que certaines créatures qui se font photographier sont pathétiques mais dans l'ensemble cette agitation autour des défilés est rafraîchissante. Fini les processions d'acheteurs habillés Yohji, les lèvres pincées, on a Anna dello Russo c'est plus drôle... Et ça vend plus.
Mais cela n'aura qu'un temps. Il y aura bien un jour où des nostalgiques diront :"ah les fashion week d'avant! Ça grouillait de monde et de street stylers! Ça c'était de la fashion week!.."

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Voici ce qui apparait à l'écran désormais lorsqu'on est sur fashionindustryconfessions.tumblr.com.

Je me faisais une joie de retourner sur fashionindustry pendant la fashion week. L'auteure avait en effet annoncé revenir sur son blog à ce moment-là. Hélas, plus de blog, plus d'archives. Ce site est était le blog le plus incroyable que je connaisse. Je l'ai découvert un peu tardivement grâce à Café Mode

Beaucoup critiqué, mais pas égalé. Imaginez une personne (faisant forcément partie du sérail, vu la qualité des "renseignements") qui balance sur le net tous les ragots et indiscrétions qui circulent dans les couloirs des rédactions, des agences de mannequins et des studios de création des maisons qui font rêver la planète fashion de New-York à Paris - sous couvert d'anonymat bien sûr - Fortiche. 

Il y avait eu dans les années 80, une aventure similaire ou une série de lettres anonymes circulaient au sein du groupe LVMH. L'auteur très bien informé, répandait les pires calomnies sur les dirigeants mais avec style et humour en signant "le fantôme de Christian Dior". Évidemment, les lettres passaient de main en main hors des bureaux du groupe mais restaient néanmoins dans le périmètre géographique de l'avenue Montaigne et la rue François 1er.

Mais dans le cas de ce blog, sur une audience planétaire via le net, la comédie peut vite tourner au drame. On y apprenait ici que telle mannequin (identifiable à ses initiales) se droguait -charmant- et là qu'une éminence grise avait décrété que le talent de tel designer (toujours avec ses initiales) se limitait à sa capacité d'acheter des pièces vintage pour les copier. Très méchant mais très drôle, forcément. Le blog eu un succès fou.

Mais l'intérêt majeur, c'est qu'à travers les lignes, on pouvait deviner une prochaine orientation éditoriale d'un magazine influent ou une tendance à venir. Nous nous demandions ce qui pouvait bien pousser une personne à ruiner ainsi le travail de ses coreligionnaires. 

Nous ne le saurons pas. Les principaux intéressés ont mis bon ordre. Rideau. Circulez, y'a rien à voir.