Il fut un temps où Solange était une bombe. Pionnière des seins nus à St Tropez, contestataire dans les amphis, choriste de Polnareff... À la suite d'un mariage bourgeois, elle ouvrit un magasin d'antiquités dans un quartier chic de Paris, devint une de ces femmes élégantes de la rive gauche, eut deux enfants et divorça sur le tard.. 

Nous la retrouvons en 2009, à 65 ans, toujours élégante "et pourtant, me dit-elle, je reviens de loin..." C'est qu'une épreuve cruelle attend la majorité des femmes qui ont dépassé la cinquantaine: la prise de poids. C'est ce qui arriva à notre Solange qui en prenant gentiment un kilo tous les ans, puis traversant une zone de turbulances hormonales, se rendit compte un jour, qu'elle devenait une mémère. Une période de déprime suivit et Solange resta bien deux années en s'habillant avec ce qui lui tombait sous la main. La vision d'une femme ronde et élégante dans la rue fut un électrochoc et elle décida alors de faire face à l'adversité.

Elle redevint élégante et surtout, elle ne fit pas mamie. Car Solange a une technique. 

Le choix des couleurs: Solange fait des associations de couleurs modernes. elle mélange par exemple le marine et le noir, ce qui peut paraître évident pour beaucoup mais qui pour les filles de sa génération, est assez novateur. Elle associe le marron et le marine, le jaune citron et le camel...

Les pièces clefs de la saison. Solange lit attentivement la presse et regarde la rue. Elle choisit parmi les "best sellers" du moment ce qu'elle peut s'approprier. Ce qui est bien quand on a 60 ans, c'est qu'on n'est pas obligé de sauter tout de suite sur la tendance, on prend son temps, on observe et quand on voit que c'est une tendance qui s'installe et qui peut fonctionner sur une femme âgée, on fonce. 

Elle n'hésite pas à franchir le seuil des boutiques de luxe. Aujourd'hui, une quadra et une trentenaire basique peuvent claquer pour un sac de luxe si elle le veulent et le porter avec du "pas cher". C'est assez récent comme démarche. Car les femmes plus âgées sont souvent intimidées par le luxe même si elles en ont les moyens.

Les lunettes: jamais sur le bout du nez avec des chaînes. Il n'y a pas pire pour faire mamie. Pour remplacer la chaîne, une sorte de collier porte-lunettes en vente chez beaucoup d'opticiens à tous les prix. Celui-ci fait 30€. Jamais de monture dorée. Chez les femmes plus âgées, le spectre du vieux, c'était les lunettes en écaille. Aujourd'hui, c'est le contraire. À cause d'un malentendu commercial qui promulgua que le doré faisait chic, les opticiens se sont jeté dessus. Qu'on se le dise: les lunettes dorées, ça fait mamie un point c'est tout. Ici, les lunettes sont des merveilles de JF REY en vente chez les lunetiers Delambre.

Ainsi, elle fait sa fière avec un pull "loose" en maille transparente (Dries Van Noten en solde), un collier Roger Vivier offert par ses enfants pour son anniversaire (elle le leur avait suggéré bien évidemment), une jupe droite (Jodhpur des Galeries Lafayette), les nouveaux mocassins de Repetto, deux bracelets exquis d' Apriati et un sac Pierre Hardy, dont elle a choisit le modèle cabas plutôt que le modèle à bandoulière qui pointu chez une jeune peut faire mamie chez une femme mature. 

L'été, elle aime les robes porte-feuille, très féminines unies ou à motifs graphiques, elle évite les fleurs. Son plus: les sandales particulières, ici un modèle UGG en peau retournée!. Notez sa montre. Une SUIW 400 de Swatch blanche. 

Ses cheveux sont blancs neige. Elle est ravie, elle a l'impression d'être platine, elle qui a toujours été châtain.

(robe Comptoir des Cotoniers, marinière Armor Lux, cabas trouvé (ô joie) en solde chez le Fenwick de Canterbury)

Il y a les femmes qui font de la gym et qui pèsent leurs aliments, il y a celles qui, avec la mode, ont jeté l'éponge et il y a celles qui promènent leurs bourrelets avec élégance. Françoise est de celles-là.

C'est une petite femme qui a toujours été ronde et souriante. À 61 ans, elle est un modèle d'élégance et de discernement en matière de mode. Et pourtant, rien ne prédestinait Françoise à être top fashion.. Mariée à un ancien trotskiste qui regardait les filles qui suivaient la mode d'un air haineux, baba cool dans les années 75/ 85, Françoise aussi revient de loin.. de plus... elle a fait toute sa carrière aux impôts dans une petite ville de province.

Alors que l'on imagine une inspectrice des impôts aussi triste que le mobilier en métal gris qui orne son bureau, force est de constater que plus d'une, en matière de mode, et de joie de vivre, en a sous le capot.  

Françoise instinctivement choisit les pièces qui font jeune sans faire ridicule ou vieille gamine. Ainsi, cet hiver elle a voulu avoir un blouson de cuir ( oh! vous dîtes-vous, quelle audace!) Elle l'a choisit noir (tendance), riquiqui aux emmanchures (re tendance) et elle l'a pris chez Caroll. Ainsi: forme classique + cuir noir = parfait pour 60 ans. Elle le porte sur un maxi pull (Monoprix), à col roulé pour cacher son double menton. Elle joue sur les contrastes de longueurs, chose qui n'est pas forcément comprise chez les femmes plus âgées. Le tout est porté effrontément sur le fameux jean de Comptoir des Cotonniers, (leur best seller d'il y a 4 ans?) qu'elle a acheté à La Redoute alors. Elle le porte retroussé sur des bottes Géox. L'été, elle a beaucoup porté de jeans retroussés à mi-mollet, ce qui faisait une belle alternative senior au short en jean à revers porté par les (beaucoup) plus jeunes. Elle est toute fière de posséder LE sac Weill crée par Mademoiselle  Agnès. (C'est sa fille qui l'a repéré dans la presse et offert).

L'été, elle porte des robes amples, comme ici, une robe-chemise qu'elle porte sans ceinture, pour faire plus cool et pas mamie. Elle privilégie les cols de chemise qui sont flatteurs aux filles qui ont injustement une "bosse de bison". Elle a craqué pour ces tropéziennes et porte un de ces cabas trouvés en Italie, pas chers et qui ont une gueule folle. L'accessoire ultime, c'est son écharpe. Ah! Quel accessoire fantastique! Il cache les doubles mentons et cous fripés divers et cache en retombant les bourrelets et poitrines omniprésentes (que vous pouvez deviner sur le pointillé du dessin). Fasse le ciel que cette mode dure longtemps. C'est le cas typique de l'accessoire mode qui va de 7 à 77 ans.

Ainsi, Françoise en associant le rose (classique) au kaki militaire (pas classique) devient une sexagénaire irradiante de coolitude... La couleur de ses cheveux, parsemés de quelques cheveux blancs, est d'origine.

(à suivre)